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We Move Together avec Martin

Consultez ici la retranscription complète du podcast de Martin Jacobs, chef de projet en téléréadaptation chez Handicap International, qui nous explique tout ce qu'il faut savoir sur la téléréadaptation, un bel exemple d’innovation en réadaptation.

 

 

Junior : Martin Jacobs, bonjour.

 

Martin : Bonjour.

 

Junior : Peux-tu te présenter rapidement ?

 

Martin : Avec plaisir, rapidement, je m’appelle Martin Jacobs, je suis kinésithérapeute de formation et je travaille chez Handicap International depuis 2016. J’ai eu l’occasion de travailler au siège de l’organisation, et puis j’ai eu aussi l’occasion de travailler sur le terrain, notamment au Vietnam, à Hanoï, où j’ai passé plus d’un an dans le cadre d’un projet de réadaptation. Et puis là maintenant, j’occupe un poste d’innovation au siège d’Handicap International en tant que chef de projet en Téléréadaptation.

 

Junior : Eh bien, Hanoï, c’est comment ?

 

Martin : Eh bien Hanoï c’est tout d’abord une immense ville d’Asie du Sud-Est, une ville au Vietnam qui s’étire sur des milliers de kilomètres. Donc il y a des gros centres urbains, mais il y a aussi un grand pourcentage de la population qui vit dans des zones rurales et qui ont parfois, dans certains cas, des problèmes d’accès aux soins de santé et notamment aux soins de réadaptation.

 

Junior : Quand on parle de « Téléréadaptation », qu’est-ce que ça veut dire exactement ?

 

Martin : La Téléréadaptation, en fait, c’est la prestation de services de réadaptation à distance, en utilisant les technologies de l’information et de la communication, comme internet par exemple.

 

Junior : Pourquoi est-ce que, chez Handicap International, on parle « d’innovation » dans l’accès aux soins de réadaptation ?

 

Martin : Tout d’abord, il faut peut-être mentionner que l’innovation fait partie de notre ADN. Dès 1982, dans les camps de réfugiés cambodgiens en Thaïlande, pour répondre aux besoins des victimes du conflit, Handicap International fournissait des appareillages et des prothèses en bambou aux personnes réfugiées. Et donc résoudre des difficultés locales, avec de nouvelles approches et technologies et des ressources locales, en fait c’est déjà innover.

Et aujourd’hui, 40 ans plus tard, nous continuons d’innover. Les technologies numériques adaptées aux soins de réadaptation font désormais partie des nouvelles solutions qu’on met en place pour répondre à des enjeux d’accès, de réduction des coûts, d’amélioration de la qualité des services de réadaptation. Parmi toutes ces solutions, il y a la Téléréadaptation.

Grosso modo, dans le monde, on estime aujourd’hui que – imaginez-vous bien – 2,4 milliards de personnes vivent avec un problème de santé pour lequel la réadaptation est bénéfique. C’est énorme. Et dans certains pays à revenu faible ou intermédiaire, qui sont les pays où Handicap International travaille, plus de 50 % des personnes qui ont besoin d’un accès aux services de réadaptation en fait n’en bénéficient pas.

 

Junior : Peux-tu donner un exemple concret de comment ça marche ?

 

Martin : Il faut s’imaginer, vous avez un besoin en réadaptation suite à une fracture ou un accident vasculaire cérébral, par exemple. Le premier kiné, le premier ergothérapeute où même orthoprothésiste, il est à plusieurs dizaines voire centaines de kilomètres. Pour y aller, vous mettez des heures parce que la route est difficile, vous n’avez pas de chance, il faut y aller régulièrement pour retrouver votre fonction maximale. Et puis, parfois vous devez même rester dormir sur place. Cela implique des coûts de transports, des coûts d’hébergement, d’être loin de vos proches aussi – dans certains cas vos proches vous sont essentiels pour avoir une certaine autonomie – ça implique aussi un manque à gagner parce que votre aidant, ou vous ne pouvez pas travailler pendant le temps passé au centre de réadaptation...

 

Junior : Je suppose que c’est un logiciel qui a besoin d’internet ?

 

Martin : OpenTeleRehab, qui est le logiciel qui a été développé par Handicap International, utilise effectivement l’accès à internet pour fonctionner. Mais la Téléréadaptation permet de faciliter le suivi à distance et d’avoir accès à des soins de réadaptation en vous connectant à ce professionnel de la réadaptation à distance. Alors ça peut être via l’utilisation d’internet, comme ça peut être via l’utilisation des réseaux téléphoniques, un appel téléphonique, un sms, c’est quelque part aussi de la Téléréadaptation. Mais ce qu’a développé et déployé Handicap International, c’est un logiciel de Téléréadaptation multidisciplinaire, donc qui permet la prise en charge du patient sous différentes expertises, comme je le disais : kinésithérapeute, ergothérapeute, et logopède, par exemple. C’est ce que propose notre outil qui s’appelle OpenTeleRehab.

 

Junior : Où est-ce que ce logiciel de Téléréadaptation est-il utilisé, et surtout, comment ?

 

Martin : Handicap International intègre des activités de Téléréadaptation dans plusieurs de ses projets depuis 2016. Et c’est vrai que la pandémie de COVID-19 a largement favorisé la mise en œuvre de cette modalité, puisque de nombreux centres de réadaptation ont été fermé pendant cette période. Et donc tout ça, ça nous a permis d’apprendre énormément. Ça nous a permis d’identifier des freins mais aussi des facilitateurs pour la mise en œuvre de la Téléréadaptation.

Donc on a conçu et déployé ce logiciel de Téléréadaptation, OpenTeleRehab. Concrètement c’est un logiciel qui permet aux patients d'accéder à distance à des plans de traitement de réadaptation qui sont sur mesure, donc qui sont conçus par leur thérapeute et qui sont adaptés à leurs besoins, à leur pathologie. Le logiciel permet, dans l’autre sens, il permet aux professionnels de la réadaptation de fournir un soutien continu par l’utilisation de messagerie instantanée, d’appel audio, d’appel vidéo et il va permettre un suivi du patient grâce à l’intégration de certains indicateurs : l'adhésion au plan de traitement du patient, par exemple – donc le thérapeute peut voir la réalisation des activités, des exercices qu’il a prescrit à son patient – l’atteinte des objectifs, les réponses à des questionnaires qu’il lui a soumis, etc. Et tout ça, ça facilite la prise en charge à distance.

 

Junior : Et justement, qu’est-ce que Handicap International a pu mettre en place pour éduquer ou informer les gens autour de cette nouvelle technologie ?

 

Martin : Eh bien, ça je dirais que ça s’inscrit peut-être dans le cadre plus global de nos projets en réadaptation. On ne met pas en place, à ce jour, uniquement des projets de Téléréadaptation. On renforce le système de santé, là où c’est possible donc dans des contextes stabilisés, peut-être pas des contextes d’urgence. On essaie de travailler sur le renforcement des systèmes de santé, en intégrant des composantes de formation. Donc par exemple du développement de curriculum de formation de kinésithérapeute au niveau universitaire, on va faire des campagnes de sensibilisation sur, par exemple, les signes d’un accident vasculaire cérébrale, on va travailler avec des centres partenaires pour les équiper, etc. Donc ça vient vraiment dans un cadre plus global de renforcement de système de santé, et dans les projets qui sont portés par Handicap International qui ne sont pas limités uniquement à la Téléréadaptation qui est finalement une des modalités de prestations de service.

 

Junior : Comment étendre justement, développer cette technologie ? Je suppose que c’est principalement en Asie du Sud-Est, au Vietnam ou au Cambodge qu’on l’utilise. Mais est-ce que l’idée c’est d’étendre cette technologie pour le reste du monde ?

 

Martin : Oui. C’est une merveilleuse opportunité, mais bien sûr il faut assurer certains garde-fous. Il y a ce qu’on appelle la « fracture numérique », donc c’est vrai que l’accès à internet n’est pas acquis pour toutes les populations, certainement pas pour les populations les plus vulnérables. Donc il faut essayer de développer des modèles alternatifs de prestations de services avec des espaces connectés dans les communautés où les patients peuvent aller se rendre et accéder à internet, par exemple. On sait que le coût des data dans certains pays est extrêmement important quand on connait le revenu, mais bien sûr, l’idée c’est que le modèle qui a été développé au Vietnam, et déployé au Vietnam et au Cambodge, soit déployé maintenant dans d’autres pays, en dehors de l’Asie, en Afrique, au Moyen-Orient, en Amérique latine, pour améliorer l’accès aux services de réadaptation.

 

Junior : On arrive bientôt à la fin de ce podcast, alors quel serait pour toi le message que nos auditeurs devraient retenir ? Qu’est-ce qui est important ?

 

Martin : Ce que moi j’aimerais qu’on puisse retenir c’est que peut-être le rôle de l’innovation pour Handicap International, que c’est notamment de permettre d’améliorer l’accès aux soins de réadaptation de qualité pour tous.

Quand on parle innovation, que ce soit dans la réadaptation ou ailleurs, on pense généralement en premier lieu à l’innovation digitale, à cette fameuse « transformation numérique ». Alors bien sûr, les solutions numériques peuvent être adaptées et sont généralement adaptées aux soins de réadaptation et font partie d’un éventail de nouvelles solutions qu’on peut mettre en place pour répondre à des enjeux d’accès – c’est ce que je disais au début – à des enjeux de réductions des coûts et d’amélioration de la qualité des services de réadaptation. Et ça se fait aussi au travers du développement d’appareillages orthopédiques comme par l’impression 3-D ou des applications mobiles de Téléréadaptation. Mais l’innovation en réadaptation, ça va aussi au-delà de ces solutions, on va dire, « high-tech ». On se veut aussi innovant dans nos approches techniques. Par exemple, on fait de la thérapie de stimulation pour les enfants malnutris ; c’est quelque chose de tout à fait innovant comme approche. On fait aussi du recyclage de composants orthopédiques. On se veut aussi innovant dans les outils qu’on développe et même dans nos pratiques en interne. Ce serait peut-être ça. L’innovation a une composante numérique, mais pas uniquement.

Et puis peut-être terminer en disant que, l’innovation, elle ne serait pas possible sans le soutien de la société civile, le soutien des auditeurs qui nous écoutent peut-être. Et donc c’est important d’en parler, de sensibiliser sur le rôle que l’innovation peut jouer dans l’amélioration de l’accès aux services de réadaptation, et bien sûr, de soutenir notre campagne « We move Together », et soutenir Handicap International.

 

Junior : « We move Together ». Un grand merci Martin, et je te souhaite une très bonne journée.

 

Martin : Avec plaisir.

 

Junior : À très bientôt.

 

Martin : À bientôt.