Esraa, le visage de nombreuses victimes innocentes
Esraa, 9 ans, a été blessée par le tir d'un sniper. La balle a causé d'importantes blessures, notamment à la colonne vertébrale. Esraa s'est retrouvée paralysée. Aujourd'hui réfugiée en Jordanie, elle est prise en charge par Handicap International.
En octobre 2012, alors que le conflit s'intensifiait en Syrie, la petite Esraa, 9 ans, buvait du thé et jouait près de chez elle, assise sous un arbre. Tout à coup, la fillette poussa un cri et se mit à pleurer. Sa famille se précipita vers elle, et découvrit qu'elle avait été touchée par un sniper. La balle avait perforé son estomac et était ressortie dans son dos, touchant sa colonne vertébrale.
Refusée par l'hôpital public, Esraa fut traitée d'urgence par des médecins d'un réseau hospitalier clandestin de Syrie. Elle fut alors transférée de l'autre côté de la frontière, au nord de la Jordanie. Les chirurgiens découvrirent que la balle avait endommagé la colonne vertébrale d'Esraa, l'empêchant d'utiliser ses jambes. Les médecins lui posèrent un matériel de fixation (plaque et vis en métal) sur la colonne vertébrale et procédèrent à une ablation d'une partie de son intestin.
Le courage d'une enfant
Une équipe de Handicap International a rencontré Esraa en Jordanie et l'a immédiatement prise en charge. Désormais, la fillette reçoit chaque semaine la visite de Mahaa, une kinésithérapeute de Handicap International qui l'aide à se remettre sur pied. L'organisation lui a fourni des béquilles pour l'aider à se déplacer, et l'a équipée en orthèses pour un meilleur soutien en position debout. Malheureusement, la blessure d'Esraa à la colonne vertébrale l'empêchera très certainement de marcher à nouveau sans assistance.
Pour l'instant, cette courageuse petite fille concentre ses efforts pour réapprendre à mettre un pied devant l'autre. Ses séances de kinésithérapie sont parfois difficiles et les efforts qu'elle fournit la laissent épuisée, physiquement et émotionnellement. En plus du traumatisme qu'elle a subi, ses blessures lui font toujours mal et c'est la raison pour laquelle elle éclate parfois en sanglots. Mais grâce à l'aide et aux paroles réconfortantes de Mahaa, elle persévère dans ses efforts et elle est bien déterminée à terminer chaque séance.
Lorsqu'on lui demande ce qu'elle regrette le plus de la Syrie, Esraa répond : « Mon chien me manque beaucoup. Et je voudrais aussi revoir mes amis et pouvoir jouer à nouveau à cache-cache. » Pour l'instant, elle doit se contenter de jouer aux cartes avec les membres de sa famille.
Des familles décimées
En Jordanie, Esraa partage un petit appartement en location avec le mari de sa sœur, ses parents et trois autres enfants. La famille est visiblement traumatisée par l'épreuve qu'elle traverse. Le conflit semble toujours très proche : la frontière syrienne n'est qu'à quelques kilomètres de là. La grand-tante d'Esraa nous confie : « Chaque jour, il y a des bombardements, des tirs et pilonnages de l'artillerie. Nous pouvons les entendre, même de là où nous sommes. »
Le bilan du conflit en Syrie est particulièrement lourd : « Tellement de gens sont morts. Tout le monde a perdu un proche, un parent, un oncle ou une tante. Certaines familles ont quasiment été décimées. »
Cette femme plus âgée a elle aussi été blessée, un mois à peine avant Esraa, sa petite-nièce. Elle nous raconte : « Je dormais dans mon lit lorsqu'une roquette s'est écrasée sur ma maison. Ce sont mes voisins qui sont venus m'extirper des décombres. Les éclats d'obus m'ont blessée dans le dos, et il me reste encore quelques fragments. Je ne peux pas rester en position assise ou debout pendant très longtemps et j'utilise la chaise roulante que Handicap International m'a donné pour me déplacer. »
La guerre leur a tout pris
La Syrie que cette famille connaissait semble désormais être un lointain souvenir. « Nos maisons ont été brûlées et détruites. Cette guerre nous a tout pris. Même nos animaux ont été tués » déclare-t-elle.
Cette famille se bat pour survivre en Jordanie. le coût de la vie est plus élevé par rapport à la Syrie : le loyer, l'eau et l'électricité sont ici beaucoup plus chers. Tous parlent de la Syrie avec tristesse, en rêvant de retourner travailler dans leur petite exploitation agricole, où ils faisaient pousser une grande variété de légumes, avec une eau disponible en abondance.
« Nous aimerions retourner en Syrie et vivre comme par le passé. Même si nos maisons ont été totalement détruites, il est préférable pour nous que nous restions ici » a déclaré la grand-tante d'Esraa.
Difficile de savoir si la situation sera un jour suffisamment sécurisée pour permettre à cette famille de rentrer chez elle, ni si elle pourra toujours avoir le même mode de vie. Pour l'instant, toutes ces personnes rêvent d'un avenir meilleur et trouvent des raisons d'espérer dans la détermination d'Esraa à guérir de ses blessures.