« Quand je trébuche, mes amis me relèvent »
Malgré sa situation, Hae Tar, 9 ans, trouve qu’elle a de la chance. Elle a des amis qui acceptent son handicap et qui l’attendent quand elle avance lentement sur les chemins cahoteux du camp de réfugiés. Mais les enfants ne sont pas tous si patients.
Malgré sa situation, Hae Tar, 9 ans, trouve qu’elle a de la chance. Elle a des amis qui acceptent son handicap et qui l’attendent quand elle avance lentement sur les chemins cahoteux du camp de réfugiés. Mais les enfants ne sont pas tous si patients.
Est-ce l’étincelle dans ses yeux noirs et brillants ? Ou son rire contagieux ? On met un moment à se rendre compte que Hae Tar Gray est handicapée. Et pourtant, l’une de ses jambes est tordue vers l’extérieur. Hae Tar Gray ne peut pas s’appuyer dessus.
Marcher et monter les pentes du camp de réfugiés sont de véritables défis pour la petite fille. L’accès à sa maison est également jonché d’obstacles. Pour rejoindre sa maison sur pilotis en bambou, elle doit sauter au-dessus d’un fossé de 1,5 mètre, un réel défi sportif pour n’importe quel enfant. Mais Hae Tar y est habituée, car elle n’a jamais rien connu d’autre. Elle avait à peine un an lorsque sa famille a fui la Birmanie et s’est installée dans le camp de réfugiés.
« Hae Tar oublie parfois son handicap », s’inquiète sa grande sœur de 16 ans, Naw Gray Poe, la quatrième d’une famille de neuf enfants. Elle accompagne Hae Tar au centre de réadaptation de Handicap International et s’assure qu’elle fait bien ses exercices. « C’est bien qu’elle s’exerce, mais j’ai souvent peur qu’elle tombe. Surtout pendant la saison des pluies, quand le camp est inondé et que les chemins deviennent glissants et dangereux. »
Une future enseignante
Hae Tar se contente de hausser les épaules et de sourire : « Quand je trébuche, mes amis me relèvent. » La fillette a la chance d’avoir quelques amis proches qui viennent souvent la voir. Ils amènent alors des feuilles d’arbre pour jouer à la dînette. Mais Hae Tar n’a pas froid aux yeux : elle adore aussi jouer à la marelle, son jeu préféré. Et supporte avec courage la douleur qui l’accompagne.
Malheureusement, tous les enfants ne réagissent pas comme ses amis. On ne la laisse pas jouer au foot et lui fait comprendre qu’elle n’y arrivera pas. Elle s’éloigne alors et joue aux osselets toute seule dans son coin. Hae Tar ne compte plus le nombre de fois où c’est arrivé. Elle est une enfant handicapée qui connaît sa place dans le camp.
Cependant, Hae Tar refuse la solitude. Pendant que les autres enfants jouent, elle prend des cours d’anglais. « Je veux devenir enseignante. Je suis déjà en troisième classe », annonce-t-elle fièrement en anglais.
Handicap International dans le camp de réfugiés de Mae La
Aujourd’hui, les enfants handicapés du camp de Mae La peuvent bénéficier des services de réadaptation au centre de réadaptation de Handicap International. Les parents, la famille et les amis de l’enfant sont formés aux exercices de réadaptation afin de pouvoir assurer la continuité. Beaucoup de ces exercices passent par le jeu. Mais les autres enfants du camp, qui sont eux aussi souvent vulnérables (malnutrition, état de santé dégradé, parents absents, histoire traumatisante…), n’ont pas l’occasion de jouer.
Pourtant, la Convention internationale relative aux droits de l’enfant des Nations unies stipule que chaque enfant a le droit de jouer. En 2016, Handicap International a donc lancé le projet "Growing Together" pour donner à tous les enfants réfugiés la possibilité de jouer et d’être des enfants. "Growing Together" est financé par la Fondation IKEA. Il se déroulera sur quatre ans en Thaïlande, au Pakistan et au Bangladesh. Handicap International va créer des espaces sécurisés ouverts à tous les enfants, valides et handicapés. Le jeu leur permettra de surmonter leurs traumatismes et difficultés. L’association accordera une attention spécifique à tous les enfants handicapés, souvent exclus, qui restent cloisonnés à la maison.
En plus des espaces de jeu inclusifs, Growing Together ciblera également les jeunes enfants présentant des risques de retard de développement. De plus, le programme engagera des prestataires de services locaux spécialisés dans le développement de l’enfant afin qu’ils soient plus attentifs aux besoins des garçons et des filles handicapés et des autres enfants vulnérables.