La solitude d'Aneth
In Laos kan zelfs de doodgewoonste handeling gevaarlijk zijn. De jonge Aneth moest dat helaas tot zijn schade en schande ondervinden. Hij werd blind en verloor een arm na een ontploffing, terwijl hij in de tuin aan het werken was. Hij was toen acht jaar.
Au Laos, même le geste le plus banal de la vie quotidienne peut devenir dangereux. Un jeune garçon, Aneth, l'a malheureusement appris à ses dépens. Il est devenu aveugle et a perdu un bras après une explosion, alors qu'il travaillait au jardin. Aneth avait 8 ans lors de l'accident.
Keongne, le village d'Aneth se situe à une trentaine de kilomètres de Villabuly. La route pour y arriver est relativement bonne: la compagnie minière qui exploite les gisements d’or et de cuivre dans la région a rénové les routes pour effectuer de la prospection. Le chemin n'est pas asphalté, mais les voitures et même les camions qui passent par là ne doivent pas slalomer entre les ornières. Il faut pourtant rouler prudemment aux abords des villages, les buffles, les chèvres ou la volaille considèrent la route comme leur domaine et contemplent votre voiture d'un air dédaigneux avant de céder le passage d'un air offusqué.
Keongne se niche dans un paysage de carte postale, les montagnes couvertes de forêts se dessinent au loin. C'est la fin de la journée, tout le monde a fini de travailler. Certains discutent au bas de leur maison, des femmes se dirigent avec les enfants vers le point d'eau à proximité pour les ablutions du soir. Au milieu de cette quiétude, un enfant seul à la fenêtre de sa maison. C'est Aneth.
Le père s'approche tandis que la maman aide l’enfant pour descendre l’échelle de sa maison et l’installer sur une souche d’arbre à proximité. Pendant toute l'opération, le jeune garçon ne souffle mot. Son visage montre une immense tristesse et à aucun moment un sourire ne vient illuminer son visage, même quelques secondes. Il tient ses yeux fermés et cache son bras gauche dans son T-shirt.
Mutilé pour avoir jardiné
Sonthai, son père, a une trentaine d'année. Avec Songlai, son épouse, ils ont eu sept enfants. L'accident s'est passé en décembre 2005, chez l'oncle d'Aneth, dans la province voisine de Khammouane. Le petit garçon avait 8 ans à l'époque. Il en a 11 aujourd'hui.
« Je travaillais dans le jardin de mon oncle, je creusais des trous pour l’aider à planter des légumes. J’ai touché quelque chose tout d’un coup et après, je ne sais pas ce qui s’est passé. Quand je me suis réveillé, j’étais à l’hôpital à Savannakhet. Je n'ai même pas vu ce que j'ai touché. Je l'ai frappé avec mon outil et... c'est arrivé ».
On emmène l'enfant inconscient d'abord au centre de santé avant de l'évacuer à l'hôpital provincial de Savannakhet. L'explosion lui a coûté la vue et les médecins ont dû l'amputer du bras gauche. Le réveil est difficile: « Quand je me suis réveillé dans le noir, j’ai eu très peur. J'ai ouvert les yeux, j’ai essayé de regarder où j'étais, mais je ne pouvais plus rien voir. J’étais très choqué».
Aneth restera à l'hôpital une quinzaine de jours avant de rentrer chez lui. Mais la vie ne sera jamais plus comme avant. Son papa explique: «Il reste à la maison. Avec les autres membres de la famille, je prends soin de lui, pour le laver l'habiller, lui donner à manger ».
Briser la solitude d'un enfant
Mais les parents, pleins de bonne volonté pourtant, ne savent pas très bien que faire pour aider ce fils qui reste assis dans la maison à longueur de journée. Et Aneth s'enfonce chaque jour davantage dans la solitude: « Je reste à la maison avec ma famille. Mes frères et mes sœurs me laissent tout seul. Je me sens honteux, parce que maintenant, je ne peux plus vivre comme les autres enfants de mon âge. Je n’ai plus d’amis. »
Désemparé, l'enfant aveugle ne sait pas comment meubler ses journées. « Je ne sais pas bien ce que je pourrais faire pour m’occuper, vu que je suis aveugle. Je ne sais pas si je suis capable de faire quelque chose pour me débrouiller seul ». Et personne ne paraît convaincu qu'Aneth puisse un jour surmonter son handicap. Alors que déjà un bâton pourrait lui permettre de se promener sans assistance dans le village, que de simples conseils aideraient ses parents à mieux prendre en charge leur fils.
Mais cette triste histoire montre surtout que quarante ans après la guerre, un enfant peut encore être victime d'une bombe, simplement en aidant son oncle au jardin. Elle montre aussi l'ampleur du travail qui reste à réaliser au Laos, simplement pour que les zones habitées soient débarrassées de la menace que font peser les bombes et autres engins de guerre non explosés lâchés sur le pays. Les experts pensent que dix ans environ seront nécessaires pour y parvenir. Oui, Handicap International pourra apprendre à Aneth à se débrouiller seul, malgré ses yeux aveugles et son bras perdu. Mais il est essentiel d'agir en amont pour éviter que d'autres petits garçons souffrent simplement pour avoir, un jour, aidé un parent dans le jardin.