Laos : H.I. fête 25 ans d’opérations de déminage
Juin 1996 : H.I. lance ses opérations de déminage au Laos. 25 ans plus tard, l’organisation continue d’œuvrer pour la décontamination du pays.
L'équipe de déminage enlève une énorme bombe (de type 500 lb Bomb GPP M43), afin d'aller la détruire en toute sécurité, loin du village de Phaja où elle a été trouvée. | © N. Lozano Juez/HI
Déminage, éducation aux risques, assistance aux victimes, plaidoyer... H.I. mène de nombreux programmes au Laos contre les armes explosives laissées par la guerre dans les années 60. Julien Kempeneers, responsable de l’Action anti-mines au Laos pour HI, revient sur les enjeux.
Nous avons lancé nos premières opérations de déminage au Laos en juin 1996. C’est un déminage d’un genre un peu particulier : ici, il ne s’agit pas de sécuriser des mines antipersonnel mais de « collecter » des restes de bombes explosées, des morceaux de bombes, des résidus explosifs, des grenades, des munitions... Les démineurs détectent également les grosses bombes, souvent lourdes de plusieurs centaines de kilos, qui n’ont pas explosé à l’impact et les transportent sur un site spécialisé pour les faire exploser.
Bombes à sous-munitions
Le Laos est principalement connu pour sa contamination aux bombes à sous-munitions (des petites bombes grosses comme une balle de tennis) que nous faisons exploser sur place : on les repère à l’aide d’un détecteur à métaux, on établit un périmètre de sécurité et chaque jour en fin de journée, on les fait détonner.
Dans la région où nous intervenons depuis 2018, à Houaphan, nous trouvons également des mines antipersonnel. Nous souhaiterions pouvoir y commencer prochainement des opérations de déminage classiques.
Une contamination d’une grande variété
Le Laos présente le niveau de contamination aux sous-munitions le plus élevé au monde. 1 200 km² de zones (plus de dix fois Paris) ont déjà été identifiés comme dangereuses. Les organisations de déminage ont signalé la présence de près de 200 types de munitions différents. H.I. a contribué à la documentation sur cette diversité en publiant un catalogue des sous-munitions qui sert à toutes les organisations de déminage au Laos.
Zones rurales et reculées
Ce sont surtout les zones rurales et reculées, dans la partie Est du pays, frontalière du Vietnam, qui ont été contaminées. Il y a encore régulièrement des victimes - des villageois, des paysans qui travaillent leurs champs… et encore beaucoup trop d’enfants. Nous menons depuis de nombreuses années des campagnes d’information aux populations locales pour leur apprendre à repérer le danger et à avoir les bons réflexes : reconnaître un objet suspect, ne pas s’en approcher, ne surtout pas le toucher, marquer la zone - avec ce qu’on a sous la main comme faire une croix avec des branchages, par exemple -, prévenir les autorités ou H.I. qui viendra détruire la bombe.
Pourquoi déminer ?
Les zones contaminées deviennent des « no man’s land ». Plus personne n’ose s’y rendre de peur de faire exploser une munition. Des champs ne sont plus cultivés, des zones entières ne connaissent aucun développement possible. Des projets comme la construction d’une école, une voierie pour désenclaver un village deviennent impossibles. En déminant, nous redonnons aux communautés des terres dont elles ont été privées pendant des dizaines d’années.
Quand le déminage prendra-t-il fin au Laos ?
Il est impossible de savoir quand nous aurons totalement déminé le pays. Nous ne connaissons toujours pas l’étendue de la contamination et il est probable que nous en ayons encore pour 30, 40 ou 50 ans... Cela donne une idée du fléau de contamination par les mines, les bombes et les sous-munitions… Le pays a été contaminé à la fin des années 60 et il y a fort à parier qu’un siècle plus tard, au milieu du 21 siècle, nous continuions les opérations de déminage.